#14 Flaubert, Jean-Hugues, le sexe et moi

Quand j’étais petite, je me sentais toujours très seule et la lecture a été mon chaudron magique, ma bouée de sauvetage pour pourfendre l’ennui, mon nuage pour m’échapper d’un quotidien parfois bizarre. 

Mais quelque soit  les personnages que j’ai investi, je me sentais l’âme du héroïne. J’ai endossé tous les rôles, pris tous les risques , chevauché … tous les chevaux ; l’hérî

ne que j’étais , à l’instar de mon corps androgyne était hermaphrodite, tant^to mâle tantôt femelle, amazone ou pilote de chasse pourvu qu’elle soit courageuse et téméraire. Même pas peur.

Petite, je m’habillais d’une cape noire sur ma silhouette d’Olive ( la copine de Popeye, grande et maigre avec une grosse tête, pleine de cheveux me concernant ) et je m’appelais Fantomette, je 

je m’envolais par les toits en faisant « bruit de Samantha , ma sorcière bien aimée » avec mon nez. 

J’étais la 7ème des gônes des compagnons de la Croix_Rousse alors qu’il n’ y a que des garçons, délaissant le club des 5 et le clan des 7 jugés trop Gnan-gnan.

Devant ma TV, J’étais Aktarus dans mon Goldorak_go !  que je préférais à la mièvre Candy qui n’en pouvait plus d’attendre son prince des collines avec sa cornemuse, même si j’aurai pu tuer père et mère pour tenir Capucin ou tout autre animal poilu dans mes bras. 

J’étais une héroïne ou parfaitement une héroïne et mon destin était de changer le monde, ou en tout cas résoudre des enquêtes ou dénoncer des malheurs. `

Je me sentais l’âme de de grogner contre les obligations, les «  on a toujours fait comme ça » pourfendre les injustices , et très vite j’ai nourri à l’égard de Willy, le mari profanateur du talent exclusif de Colette un vif ressentiment et un dégoût pour l’usurpation. Claudine est rentrée dans ma vie et avec elle le bingewatching littéraire et une passion pour les sagas.

Que n’ai je pas supplié ma mère de m’emmener à la seule grande librairie de Nancy pour acheter toute l’oeuvre de Colette puis celle de Zola. J’avais punaisé l’arbre généalogique des Rougon_macquart dans ma chambre jusqu’à ma rencontre avec Flaubert. Ah Emma que je t’ai détesté et aimé, dans tes attentes, dans tes ennuis  de province, dans tes envies et tes désillusions;Que j’ai detesté que tu lâches l’affaire et choisisse la simplicité. Grâce à toi j’ai su très vite qui je ne voulais pas être mais bitch, tu m’as filé le virus d’un romantisme délétère. Etde Flaubert j’ai retenu cette citation qui me va si bien «  Je suis d’une sensibilité absurde, ce qui érafle les autres me déchirent » 

Le cinéma est entré dans ma vie à l’âge de 7 ans lorsque je m’effondre, prise d’un incontrôlable chagrin dès que les lumières se sont rallumées à la fin d’ET. 

Depuis le 7ème art n’a eu de cesse de m’emporter dans le tourbillon de ses nouvelles héroïnes, m’a fait connaitre mille et un métiers,  m’a fait toucher du doigt (hm hm ) la plastique masculine, enfin du coup ma plastique. Juste un doigt, « vous ne voulez pas un whisky d’abord ? « (sounddesign) 

A l’époque quand on allait pas au cinéma , il fallait attendre très longtemps avant que le film sorte en VHS (environ 5 ans). Ce que nous appelons aujourd’hui la chronologie des média  ne nous donnait pas accès rapidement à la fameuse deuxième fenêtre. 

Si vous rajoutez à cela le comité de censure maternelle qui voyait  dans certains films l’appel à la débauche à laquelle j’avais très certainement de très bonnes dispositions, ma culture cinématographique a pris du temps à s’installer. Pensez donc que le film « la boum » fut considéré dans la maison familiale comme potentiellement subversif, alors « l’effrontée » et c’eut été  une tentative de putsch adolescente dans les beaux quartiers nancéiens. J’avais quand même réussi à choper « Diabolo Menthe à l’eau » en douce et « l’hôtel de la plage » parce que j’adorais Mort Shumann.

Bref de mémoire, le cinéma à part les sordides Walt Disney juste bons à nous faire passer pour des femelles endormies que seul le baiser d’un ridicule Prince en collant blanc sans aucune anatomie masculine visible pouvait faire sortir de leur misérable condition) , a vraiment démarré au sortir d’une adolescence commencée assez tôt ( Déso, j’ai pas la date de fin) 

Les premiers  chocs sont  venus de 2  films : le vieux Fusil et le choix de Sophie, 2 films qui vous enseignent plus que tous les livres d’histoire sur les bourreaux et leurs victimes, sur ce que l’homme est capable de faire à son prochain.

Lino Ventura a souvent été mon père, il m’aurait giflé quand je lui aurai répondu «  la liberté «  à sa question débile « Que veux tu » ? , il aurait enflammé ma décapotable avec mon propre cocktail molotoff  quand je lui aurai dit «  le capitalisme c’est foutu » mais l’aventure reste l’aventure.

La littérature est l’acte fondateur de ma vie amoureuse, Laclos m’a appris les amours épistolaires, Valmont la volupté, Wilde l’hédonisme. 

Avec le cinéma, j’ai voulu faire tous les métiers, J’ai été journaliste d’investigation avec Bob et Carl, juge dans un tribunal pour calmer 12 hommes en colère, infirmière en chef pour sauver Mc Murphy, Professeur pour qu’on me dise « Captain my captain » et encore professeur des écoles pour ressembler à Marie-Sophie L dans un de mes films préférés «  La belle histoire « , J’ai été fermière au Kenya pour sauver une tribu, agent du FBI pour traquer un serial Killer  et surfeuse avec Keanu Reaves.J’ai même crée des petits pots pour bébé comme Diane Keaton.Mais surtout surtout je ramassais des poignées de terre dans ma main et criais le regard pénétré, un des sourcils relevés ( hyper dur à faire , essaie toi même ) et comme Scarlett je disais dans mon anglais pourri  «  I ve never be hungry again ». En revanche, No way, Ashley même pas en rêve. 

Avant de m’attaquer physiquement sexuellement aux hommes , j’ai eu ma période fleur bleue avec bébé et Patriiiiick , j’ai appris à ôter mon soutif qui ne soutenait que mon égo grâce à Alex Owens dans Flashdance, et mes premières questions existentielles ont été si esthétiquement mises en apesanteur dans les ailes du désir de Wim Wenders. 

Plus tard, j’ai rêvé de la courbure de fesses d’aDJANI pour que les hommes , à l’instar de Pimpon soient fous de moi et que je puisse hurler dans la rue «  Quoi tu veux mettre une armure, tu veux t’envoyer Jeanne d’Arc ? Sounddesign«  moi la Lorraine avec mes gros sabots

SI je dois mon irrespect des conventions, c’est bien grâce à une femme sous influence et puis un peu plus tard à Thelma et Louise. ( Avec ou Sans Brad Pitt) 

Je suis bien entendu tombée en amour de Romy comme nous toutes (sauf de Sissi que j’avais envie de gifler et dont je n’ai jamais vu plus de 4’30mn) et avec elle le cinéma de Sautet.

J’ai regardé ces films à l’époque où on se sent une femme mais que l’on n’est pas vraiment complètement. J’écoutais la chanson d’Hélène qui m’accompagne encore aujourd’hui dans mes playlists et qui m’a donne une vision différente du couple traditionnel et surtout d’une certaine idée de la bienveillance féminine. 

Romy qui me fait découvrir un des plus beaux homme sur la Terre, Samy , la voix la plus sensuelle au monde ( mon ex-mari à 40 ans lui ressemblait fortement d’ailleurs) 

Je suis définitivement tombée amoureuse des grands hommes bruns quand j’ai vu Greta Scacchi dans les bras de Peter Coyotte. J’ai d’ailleurs joué  avant lui «  Lunes de fiel » avec son sosie, de 20 ans mon ainé fin des années 80. Pascal Bruckner je te dois des après-midi entiers de sexe débridés et nabokoviens.

Quelques mois plus tôt, je rêvais d’être une sirène pour aller chercher Jean-marc en apnée alors que je roucoulais avec un des hommes de ma vie, escogriffe  musicien de jazz, au regard à tomber par terre et qui prenait mon visage dans ses mains pour m’embrasser ( sérieux les meufs, ne peut on pas tomber éperdument amoureuse d’un homme qui sait prendre votre visage entre ses deux grandes mains en vous disant je t’aime ? ) Un peu  comme le beaucoup trop sexy Gérard Lanvin dans Saxo. 

Ce ne sont pas les «  Lui et autres « playboy « de mon père, si mal cachés dans le grenier qui ont fait de moi une femme passionnée de sexe. 

Nous, génération 70,  sommes nées sans ordinateur, étions des adolescentes sans internet et sans aucun accès à la pornographie en 1 clic.

Comment avons-nous appréhendé la sexualité sinon dans les livres ? ( bon un peu le dimanche soir sur M6 mais pas de quoi fouetter une chatte non plus ) 

J’ai découvert Anais Nine à 16 ans en tombant par hasard sur la couverture de Vénus Erotica, puis Miller lui a succédé et quand j’ai lu le boucher d’Alina Reyes, j’ai compris que je ne serais jamais vegan.

Jeremy, j’aurai voulu être fatalement ta Juliette , Christophe j’aurai fait le tour du paté de maison à genoux sur des clous et nue pour te  retrouver  dans ton fauteuil dans Péril en la demeure, ou pour toi Zorg dans ton bungalow ,j’aurai gardé mes dents du bonheur pour être ta Betty et humecter ta mouture. 

Zorg, que j’ai retrouvé une nuit d’été en ville avec Marie, ou à la montagne avec Elie et ses marmottes.

Ah Jean-Hugues que je t’ai aimé, partout tout le temps, je t’ai aimé blessé, je t’ai aimé dans le métro, je t’ai aimé dans tes quêtes nocturnes, et surtout surtout j’aurai pu tomber malade d’amour pour toi, à l’instar de natassia à qui l’époque on me prêtait une vague ressemblance. 

Et puis grâce à toi, j’ai découvert Philiipe Djian, l’écrivain de mon coeur, celui que je lisais pendant des cours de philo de mon bac A2. Celui par qui l’étincelle de la littérature contemporaine s’est allumée. Ah Philippe, mon amour, les pages de Maudit manège sont encore humides de mes larmes, celle de Lent dehors sont usées d’avoir été tant lues, froissées de ma fébrilité à parcourir des phrases sur lesquelles je restais bloquée d’émotions pendant 2 longues minutes.

Avec toi Philippe, j’ai découvert ce que c’est que de rester interdite comme une pelouse, figée dans la phrase, suspendue à ta plume. 

Grâce à toi Natassia, j’ai voulu être une femme dans un harem avec Ben, tu as été la quintessence de la beauté, la féminité, la sensualité. 

Ces histoires dans les livres ou sur grand écran m’ont appris l’amitié, la famille ( surtout dans Festen quel chef d’œuvre ! )  l’amour, la passion, la sexualité,. Un dernier tango m’a fait la surprise de découvrir qu’il y avait donc d’autres zones possibles à envisager…avant d’apprendre les conditions du tournage et d’en être choquée. 

Le cinéma la littérature ont t elles fini de bousculer ma vie ? Y a t il eu un moment où j’étais moins perméable aux histoires ? Non 

Ma maman m’a un jour reproché d’être une diva : j’ai toujours eu il est vrai l’envie impérieuse de faire de ma vie un roman. Les personnages ont sublimé ma vie , l’ont transcendé.

Quand des jolies histoires ont éclos, je les ai vécues encore plus puissamment grâce aux talents des auteurs qui m’ont inspirée. Ils m’ont donné l’envie d’avoir envie johnny, , et aussi en mettant un point final à leur roman ou à leur film, m’ont fait toucher du doigt leur évanescence afin que j’en profite à chaque instant.        

24 h dans la vie d’une femme , je les ai vécu 72H avec un homme que j’ai aimé, puissamment, follement, le temps d’une escapade normande.

Mes rêves aujourd’hui se construisent autour d’un livre que j’ai à écrire, s’inspirant de ces tribus de femmes qui vivent en parfaite autarcie. Non pas que j’ai viré ma cuti car je suis trop amoureuse des hommes et de leur sexe, de leurs poils, de leurs odeurs, de leur douceur et de leur brusquerie.

En me ré inventant mon monde de demain je le vois dans un partage féminin de nos charges mentales, dans une sororité de chaque instant, je le vois dans un quotidien à la fois plus solitaire pour prendre conscience de notre être et notre individualité  et à la fois dans une joyeuse cacophonie créatrice et solidaire. Je n’y exclus pas les hommes mais je n’ai plus envie de faire la gueule quand ils regardent un match de foot ou qu’ils ne comprennent pas que Dirty Dancing, c’est la base. Même si on l’a vu 456000 fois. 

On pourrait imaginer des séances de ciné mixte en plein air avec la cité de la peur. Hyper fédérateur ca la cité de la peur, non? 

Je vois mon monde de demain en pleine nature avec un potager et des poules, je le vois comme des grandes maisons respectueuses de notre planète, des écoles avec des enfants à qui on apprend à faire des câlins aux arbres plutôt que Pythagore ou en tout cas dans des proportions justifiés. Une espèce de folie entre le Katmandou de Barjavel ( pour le côté hot) et Pierre Rabhi, assaisonné de Philippe Tesson mais avec la fibre 4G , une bonne playlist et un ét ablissement secondaire des chandelles, le tout drivé par un Patrick Dewaere en psy pour les séances collectives. ( si vous n’avez pas vu ce film méconnu de Philippe de Broca, il est en streaming..une pépite) 

Une sobriété non radicale peut-être mais tellement romanesque . On pourrait même en faire un film non? 

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